Un article de Philippe Watrelot dont je partage l'analyse à propos du mouvement des stylos rouges :
" Plusieurs articles reprennent l’information : des enseignants ont décidé de créer un collectif intitulé « Les stylos rouges » sur le modèle des gilets jaunes. On ne va pas ici gloser de manière un peu vaine sur le symbole retenu pour caractériser les enseignants. Apparemment, si on veut se faire entendre, il faut aujourd’hui choisir un objet et une couleur : on a eu les bonnets rouges, on a les gilets jaunes et donc maintenant les stylos... Avant, il y a quelques années on a eu les pigeons, les dindons, et d’autres volatiles...
Les stylos rouges veulent donc s’organiser sur le modèle des gilets jaunes et cherchent à élaborer une plate-forme de revendications et des modalités d’actions à partir des réseaux sociaux. Et cela semble séduire les médias, ce qui contribue à leur notoriété.
Comme beaucoup, je regarde ce mouvement qui se crée avec des sentiments ambivalents. Avec de l’agacement teinté de réalisme mais aussi un certain optimisme... "
Optimisme
Ce qui rend optimiste un vieux militant comme moi c’est de constater que lorsque la situation l’exige, on voit apparaitre de nouvelles mobilisations et de nouveaux acteurs.
Et les revendications appuient là où il faut : sur le salaire et les conditions de travail. Car c’est sur ces aspects concrets que se fracassent les beaux discours sur l’école de la confiance.
Bien sûr, on peut être prudent voire méfiant sur d’autres revendications. Comme cela s’est déjà vu, il y a des tentatives de récupération qui sont à l’œuvre. On sait aussi, on l’a vu récemment, que ce type de mobilisation est peu propice au changement et pousse plutôt au conservatisme.
On ne me verra pas, pour ma part, soutenir des mots d’ordre voyant les élèves ou les parents d’élèves comme des ennemis ou bien encore prônant un individualisme et une liberté pédagogique conservatrice. Et encore moins toute posture favorisant l’élitisme et le maintien des inégalités.
Mais, à double titre, en tant qu’enseignant et militant, je suis optimiste. Et je fais le pari que la mobilisation peut se développer avec ces nouveaux canaux et ces nouveaux acteurs sans que cela rende obsolète l’action syndicale et associative et même conduire à des convergences. On peut assister à une prise de conscience collective accélérée qui parvienne à dépasser le corporatisme et l’individualisme pour faire aboutir des revendications simples et essentielles. Et si ça marche, tant mieux !
Face à ce type de mouvement, il faut donc dépasser l’agacement légitime et regarder cela avec bienveillance. Il nous faut, pour reprendre une formule de Romain Rolland popularisée par Antonio Gramsci : « conjuguer le pessimisme de la raison et l’optimisme de l’action»
Philippe Watrelot
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